Concours de la BD scolaire : n’oubliez pas de vous documenter !

Le mercredi 25 février 2015 à 11h37

Thierry Mary continue à vous prodiguer des conseils pour le Concours de la BD Scolaire du Festival International de la Bande Dessinée d’Angoulême. Après être revenu sur le règlement, les sources d’inspiration, et le mode d’élaboration d’une BD, il s’attaque à présent à la question (cruciale !) de la documentation.

×

© Béatrice Revel

×

T. Mary : Une légende, très répandue, voudrait que l’auteur de bande dessinée livre un combat épique et titanesque pour parvenir à remplir d’images sa feuille blanche.

Il est seul, armé d’un crayon et d’une gomme ; face à lui se dresse une feuille blanche, apparemment impassible, et qui ne semble pas vouloir s’en laisser compter. L’auteur, qui ne craint rien, se jette à corps perdu dans la bataille. Il affûte son crayon et attaque la feuille, gomme, et revient à la charge. Au final, après plusieurs heures, peut-être des jours, voire des semaines, il a vaincu, enfin ! La perfide feuille est désormais recouverte de personnages, de bâtiments, de couleurs, de bulles et de mystérieuses gouttières.  Pour ressortir vainqueur de ce combat sans merci, la documentation est essentielle.

Voici un point très important et très souvent négligé par la plupart de ceux souhaitant se lancer dans la bande dessinée : une bonne documentation est absolument nécessaire… et d’autant plus, si on est débutant. Mais attention, il ne s’agit pas de simplement décalquer une image pertinente trouvée sur Internet.

Avant de vous lancer dans la réalisation de votre projet de  bande dessinée, vous devez d’abord définir le contexte, les lieux, l’époque et les personnages de votre histoire.

Imaginons que vous ayez entrepris une nouvelle adaptation du Petit Chaperon Rouge. Vous allez sans doute devoir dessiner au moins un arbre, sinon toute une forêt. A priori, tout le monde sait à quoi ressemble un arbre. Pour autant, en voulant dessiner uniquement de mémoire, le résultat risque d’être insuffisant pour être tenu comme crédible par votre lecteur.

Dans l’idéal, quand on doit dessiner un arbre, le mieux est d’aller là où on peut en trouver un (une forêt, un parc…) et, une fois sur place, muni de son carnet de dessin, exécuter quelques croquis d’observation. La manière dont cet arbre s’enracine dans le sol, la forme de son tronc, comment ses branches s’élancent vers le ciel, la forme de ses feuilles et leur répartition sont tous des détails significatifs. Ne vous y trompez pas, votre lecteur saura très bien faire la différence entre un chêne et un palmier.

La documentation et l’observation vous permettent d’appréhender la structure de ce que vous devez représenter par le dessin et de comprendre ce qui fait sens : un chêne et un palmier sont deux espèces très différentes. Sous lequel de ces deux arbres souhaitez-vous voir vos personnages évoluer ?

La documentation évite aussi de tomber dans les pièges de l’anachronisme. Si votre histoire se déroule pendant les premières Olympiades de 1896 par exemple, il vous sera probablement utile de connaître les tenues des sportifs de l’époque pour éviter des erreurs en les affublant, malencontreusement, de survêtements trop modernes pour un début de XX siècle.

De manière générale, si votre histoire se déroule en un lieu précis, en un temps précis, essayez d’en retrouver des images d’époque. Elles vous fourniront toutes les informations quant à l’architecture, la mode ou les objets en vogue que vous pourrez utiliser pour crédibiliser votre dessin. Maintenant, précisons-le, l’objectif n’est pas de faire un dessin documentaire, un plan d’architecte, ou de représenter forcément chaque bouton d’un uniforme. Votre objectif est de donner l’illusion que cela est juste pour faciliter au maximum l’accès  à votre univers.

Il faudra donc nécessairement consacrer du temps à cette recherche documentaire : le temps de se déplacer et d’exécuter ses croquis ; le temps passé à la médiathèque ou chez soi à rechercher des documents pertinents ; le temps pris à prendre des notes sur les mœurs de l’époque ou à écrire les relations que peuvent entretenir les différents éléments que vous avez recueillis pour vous faire une image plus juste de l’ensemble. Et pendant tout ce temps, vous n’avez toujours pas finalisé le début d’une case alors que la date de remise du projet est pour bientôt. Dépêchez-vous !

Il faut ensuite utiliser les documents réunis à bon escient, avec prudence et créativité. Rien ne vous empêche de redessiner à l’identique des cases faîtes par un auteur que vous admirez… mais ceci doit rester un exercice. Dans le cadre d’un concours ou pour un projet qui a l’ambition d’être publié d’une manière ou d’une autre, c’est à proscrire. Au mieux cela pourra être considéré comme un hommage, mais plus sûrement comme un plagiat… et c’est tout simplement interdit (récemment, encore, un auteur japonais a vu sa série arrêtée pour avoir redessiné à l’identique des photos qu’il avait pioché au hasard sur Internet).

Pour finir, faites attention à l’interprétation que vous pouvez faire de votre documentation : certains documents peuvent être erronés, il est donc avisé d’utiliser plusieurs sources pour les comparer. Certains documents peuvent être incomplets : ce n’est pas parce que vous n’avez trouvé que des photographies en noir et blanc de l’époque que la couleur n’existait pas !

En passant, je serai présent au Festival international de la bande dessinée d’Angoulême sur le Pavillon Jeunes Talents. N’hésitez pas à venir me voir pour discuter de bande dessinée. Venez avec vos dessins !

Ce sera aussi l’occasion de découvrir l’exposition dédiée aux lauréats de l’édition 2010/2011 du concours de la BD scolaire de la Caisse d’Epargne qui prendra place au Quartier Jeunesse. Bonne idée pour une première approche de ce que le jury attend de vous, et pourquoi vous permettre de rêver d’être à leur place l’année prochaine !
 

Thierry Mary

-

Biographie :
Thierry Mary est le Directeur de l’Iconograf. Créé en 2003,  l’Iconograf est un organisme de formation à la bande dessinée situé à Strasbourg. Thierry dirige la collection d’ouvrages pédagogiques « les cahiers de l’image narrative » coéditée avec le CRDP d’Alsace, Il est aussi le co-fondateur des éditions ASTEURE.

Thierry à aussi lancé le projet d’un label d’édition numérique qui verra prochainement le jour : Watch Digital Comics

Les liens:
L’icconograf : www.liconograf.com
Facebook de L’iconograf : www.facebook.com/ecolebd
WATCH : www.watchcomics.com
Facebook de Watch : www.facebook.com/watchdigitalcomics

-

Thierry Mary nous a déjà soumis  de précieux conseils sur les sources d’inspiration, l’élaboration d’une bande dessinée,  et le réglement du Concours de la BD scolaire.

 

×

Une question ? Un commentaire ? Discutons sur les réseaux.