Gilles Rochier Faut tenir le terrain

Depuis 1996, Gilles Rochier développe une œuvre largement autofictionnelle, ancrée dans des paysages urbains. S’il évolue en tant que personnage, les questionnements sur le rapport à soi et aux autres demeurent, et l’auteur vise
toujours aussi juste. Entre tracas et brimades, solidarité et vie familiale, cette exposition revient sur les motifs qui traversent l’œuvre d’un enfant de la banlieue.

×

Gilles Rochier dessine ce que d’autres s’échinent à rapper : une vie passée en périphérie de la capitale, des attentes parfois frustrées, des trajectoires qui dévient ou qui se forgent dans la volonté. En 1998, NTM scandait : « Faut tenir le terrain pour le lendemain / S’assurer que les siens aillent bien / Éviter les coups de surin / Afin de garder son bien intact » (Laisse pas traîner ton fils). Les récits de Rochier expriment le sentiment d’urgence.

La réalité du quotidien n’épargne aucun de ses personnages, et les drames qui jalonnent ses récits sont nombreux. Au fil de son œuvre, l’auteur fait preuve d’une cohérence impressionnante et livre un témoignage sincère et pudique de la vie qu’il mène de Montmorency à Colombes. Son parcours est celui d’un autodidacte : il a commencé à dessiner avant même de savoir écrire, a découvert sa passion pour le neuvième art avec Métal Hurlant, puis, mettant de côté la peinture, il réoriente sa vie pour se consacrer à sa passion après une période de chômage, d’errance et de dépression qu’il raconte en 2008 dans Temps Mort (6 Pieds sous Terre).

Gilles Rochier se lance dès 1996 dans l’aventure de la microédition avec le fanzine Envrac, mais l’ambition de départ est seulement de divertir ses proches. Déjà, il aborde des thématiques qui deviendront récurrentes dans son œuvre : la représentation et l’appréhension de soi, la vie urbaine comme terrain de jeu. Le quotidien du quartier de l’auteur est raconté sous forme de saynètes où le sentiment d’abandon et la grisaille nourrissent la frustration et le malaise des habitants, mais où de vraies complicités, de vraies belles relations existent toujours.

Gilles Rochier ne revendique aucune influence graphique. Hormis dans Dunk, Chicken and Blood, l’histoire d’un jeune lascar qui cherche à se procurer la paire de baskets de ses rêves, où il use d’un trait rond inhabituel, son style se démarque par son aspect brut et efficace. L’auteur a reçu le Prix Révélation au Festival d’Angoulême en 2012 pour TMLP-Ta Mère La Pute (6 Pieds sous Terre), où il raconte sa jeunesse et la prostitution de certaines mères de famille du quartier pour boucler les fins de mois.

À l’occasion de la sortie en 2017 de La Petite Couronne (6 Pieds sous Terre) et de Tu sais ce qu’on raconte... (Warum), cette exposition mettra en lumière les figures qui habitent l’œuvre de l’auteur, à travers la présentation de planches originales.

×

Espace Franquin du 25 au 28 janvier 2018
Production : 9e Art+ / FIBD
Commissariat et scénographie : Marie Fabbri et Juliette Salique