Hermann : le naturaliste de la bande dessinée
Parmi les quelques 5000 planches de bande dessinée produites par le torrent créatif d’Hermann depuis 50 ans, plus de 150 d’entre elles ont été choisies pour l’exposition que le Festival consacre au président de sa 44ème édition.
Né en 1938, Hermann passe son enfance dans la campagne boisée ardennaise. Il en garde un goût prononcé pour la nature qui n’a cessé de nourrir son dessin, lui insufflant ce surplus de vie qui transforme le décor en véritable protagoniste de l’œuvre. L’exposition s’emploiera à montrer la diversité des terrains arpentés, la récurrence des forêts et des massifs rocheux torturés, où l’âme de chacun se voit révélée à nu.
Lorsqu’il devient rédacteur en chef du Journal de Tintin en 1964, Michel Greg cherche d’emblée à donner au titre une nouvelle impulsion, et Hermann se révèle l’auteur idéal pour cette modernisation. Son dessin réaliste et vibrant met en lumière les aspects les plus novateurs des intrigues, et Bernard Prince, créé en 1966, puis Comanche, créé en 1969, gagnent vite les faveurs d’un lectorat avide de nouveautés.
En cinq décennies, le dessin d’Hermann n’a cessé d’évoluer. Ces mues ne sont pas seulement les manifestations de changements réguliers d’outils de travail (pinceau, plume, Rotring, aquarelle). Chaque fois, l’évolution du style paraît anticiper le nouvel instrument de travail à venir. La première partie de l’exposition montrera que, chaque étape étant en gestation dans la précédente, il n’y a pas de rupture dans le style d’Hermann, mais la continuité manifeste d’une recherche.
Les bandes dessinées d’Hermann se sont assez vite distinguées par leur traitement de la violence. Parfois frontale, parfois traitée en hors-champ, cette violence est le fruit d’une société âpre où les plus forts s’imposent. Prisonniers torturés, cadavres exposés ou décapités, exécutions sommaires abondent dans une œuvre cohérente où le manichéisme a disparu au profit d’un pessimisme programmatique. Après une dizaine d’années passées à œuvrer sur les récits d’un autre, il est significatif que, dès ses premières histoires en solo, au milieu des années 1970, Hermann accorde une place importante au silence. Face à la beauté de la nature comme devant l’abjection, il sait qu’il n’y a pas besoin de commenter. Il a confiance dans la force du dessin et dans l’intelligence du lecteur. Dans ses utilisations multiples du silence réside une grande partie de sa modernité. Affirmation de son statut d’auteur, c’est aussi un marqueur de son approche plus réaliste de l’aventure et de l’action.
Représentation de la vie quotidienne, diversité des physiques humains, précision dans la description des environnements… Autant d’éléments qui font d’Hermann un émule du naturalisme littéraire, transposé dans la bande dessinée. Le cœur de l’exposition s’attachera à montrer les différents aspects de son œuvre qui le rattachent à ce courant. Son humanité est ainsi diverse et crue, loin des représentations aseptisées. Le sublime et le trivial se côtoient dans les plus belles planches de son œuvre.
Hermann a œuvré dans pratiquement tous les genres de la bande dessinée. Quel que soit le répertoire choisi par cet auteur complet, ses productions émettent une pulsation particulière, liée à l’équilibre que le lecteur y trouve, entre divertissement et réflexion lucide, entre action et psychologie. Mais s’il est un registre auquel le nom d’Hermann reste indéniablement lié, c’est bien celui du western. Dans Comanche, Hermann et Greg observent de près le personnel d’un ranch bien ancré dans le terroir, et le héros – Red Dust – se révèle bien plus faillible que son rival et aîné – le Blueberry de Giraud et Charlier, créé en 1963, inépuisable lieutenant de cavalerie qui œuvre à la sauvegarde de la nation. Duke, livre écrit par Yves H., le fils de l’auteur, paraîtra en janvier 2017 à l’occasion du Festival. Ce nouveau western marque l’attachement d’Hermann au genre.
À travers l’exposition de ces 166 œuvres originales, le Festival espère ainsi témoigner de la richesse et de la cohérence d’une œuvre qui s’est déployée sur plus d’un demi-siècle et qui poursuit sa course, indépendante et sans concession, à l’image de son auteur. À travers les époques et les styles, usant d’une vaste palette d’outils, Hermann a creusé son sillon sans se soucier des modes, ce qui ne l’a pas empêché de séduire le grand public. Car à l’image du titre de son dernier livre, publié en 2016, Hermann est un passeur de la bande dessinée.
Espace Franquin, salle Iribe, 1, boulevard Berthelot du 26 au 29 janvier 2017
Production : 9eArt+
Commissariat : Vladimir Lecointre et Stéphane Beaujean
Le catalogue de l'exposition
Le catalogue de l'exposition "Hermann, le Naturaliste de la bande dessinée" édité a l'occasion de l'exposition au Festival International de la Bande Dessinée d'Angoulême comporte plus de cent reproductions de planches originales, les textes de l'exposition et les témoignages de plusieurs auteurs de bande dessinée. Ce catalogue de 128 pages (imprimé sur papier Muncken pur 150) s'annonce comme un ouvrage de référence.
Tirage à 2 000 exemplaires, vendus exclusivement durant le Festival d’Angoulême (du 26 au 29 janvier 2017), et sur ce site : www.bdangouleme.shop
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et de l'Offre “Pass premium Hermann” pour réserver votre pass adulte 1J+ le facsimilé exceptionnel de "Jeremiah, tome 19, Zone frontière, planche 25" (Dupuis, 1996) numérotée et signée par l'auteur. Limitée à 100 pass www.bdangouleme.com/39,tarifs-et-billetterie